L’IAC s’oriente de plus en plus vers la culture in vitro, une technique innovante permettant de faire pousser des plantes miniatures dans des conditions contrôlées. Oxanthera spp., un agrume (Citrus) endémique, est à l’avant-garde de cet effort de recherche. Il sert actuellement de plante modèle pour évaluer la tolérance au stress hydrique, un enjeu majeur face au changement climatique. D’autres plantes sont aussi à l’étude.
Le réchauffement climatique de + 1,1 °C en moyenne dans le Pacifique Sud, accompagné de canicules plus fréquentes et des sécheresses plus intenses (source Clipssa, IRD et Météo-France), menace sérieusement les cultures fruitières et maraîchères en Nouvelle-Calédonie. Dans ce contexte, l’IAC a choisi de travailler, entre autres, sur une plante modèle, Oxanthera spp., un Citrus endémique qui pousse naturellement en forêt sèche et sur maquis serpentineux, dans des conditions arides.
Contrôler le facteur hydrique
Actuellement, l’IAC s’oriente vers la culture in vitro pour mieux comprendre les mécanismes physiologiques d’adaptation à la sécheresse. Valérie Kagy, chercheuse en physiologie végétale, souligne l’avantage de cette approche : « En pépinière, il est difficile de forcer un stress et observer les impacts directs. Oxanthera spp. pousse extrêmement lentement. Son port est frêle. Nous ne maîtrisons pas la variabilité du patrimoine génétique, ni la météo. Avec la culture in vitro, nous pouvons standardiser la plupart des paramètres et n’en faire varier qu’un seul, en l’occurrence l’eau. »
Carole Martin, ingénieure d’étude en biotechnologies , explique le protocole de culture in vitro qu’elle a mis au point, après plusieurs mois d’essais : « Nous fournissons aux plants un milieu nutritif de qualité constante, avec des nutriments et des hormones de croissance. Nous réalisons des microboutures à partir d’un plant initial qui s’est développé en milieu confiné et assaini. Tous nos plants miniatures sont donc des clones, ce qui élimine la variabilité du patrimoine génétique. Avec ces conditions de croissance optimales, les Oxanthera spp. sont touffus et foisonnants ! Nous pouvons alors tester diverses conditions de stress hydrique, plus ou moins intense, plus ou moins prolongées. À terme, nous pourrons tester d’autres paramètres tels que la salinité ou la teneur en métaux. »
Une recherche qui s’inscrit dans une dynamique mondiale
Pour l’instant, l’eau est le seul paramètre que font varier nos scientifiques. Les espèces comme Oxanthera spp. ont développé des adaptations inédites pour survivre au manque d’eau : est-ce une croissance ralentie ? Des ajustements physiologiques au niveau des organes et des cellules pour une réduction des échanges hydriques ? Des mécanismes génétiques ? « Actuellement, le mystère reste entier. Seules des recherches fondamentales approfondies permettront de lever le voile sur ces questions. Ces implications dépassent les frontières de la Nouvelle-Calédonie, car le changement climatique touche la planète entière. Nos recherches s’inscrivent dans une dynamique mondiale et nous avons déjà consolidé plusieurs partenariats, au niveau national et international. Le potentiel innovant d’Oxanthera spp. est considérable. Grâce à nos méthodes de multiplication de masse, nous pourrons isoler plus vite des plants plus productifs. Les fruits d’Oxanthera ont une odeur très originale et produisent beaucoup plus d’huile essentielle que les agrumes classiques, ce qui pourra offrir des opportunités de découverte de biomolécules d’intérêt pour de nouveaux médicaments, biopesticides, cosmétiques ou encore parfums. La Tech liée à la valorisation de notre agrobiodiversité exceptionnelle a un bel avenir devant elle ! » conclut Valérie Kagy.
Continuer à progresser sur les techniques de CIV
Carole Martin a eu l’opportunité de participer à un workshop sur la culture in vitro à Bangkok, pendant 2 jours mi-décembre 2023. Intitulé “Quality Management System for Plant Tissue Culture”, il était organisé par l’APAARI (association Asie-Pacifique des organismes de recherche agronomique), association dans laquelle l’IAC est membre depuis plus de 20 ans. Cet évènement a rapproché pas moins de 19 pays (zone Asie Pacifique), afin d’échanger sur les moyens techniques et les dernières avancées dans le domaine de la vitroculture. En plus des nouvelles connaissances acquises, Carole a pu nouer de nouveaux contacts avec des chercheurs spécialistes de la CIV, constituant ainsi un précieux réseau sur lequel nous pouvons nous appuyer pour progresser dans ce domaine de la biotech.